Quouquou.
Avant tout, je tiens à remercier ce site, ce forum et les gens qui y participent car vous m’avez beaucoup aidé et apporté. Nous devons nous serrer les coudes, nous entraider et nous soutenir les uns envers les autres et d’autant plus dans ce genre de situation. Après huit mois de chimiothérapie il est temps pour moi d’à mon tour conter mon histoire et de tendre la main à un maximum d’entre vous.
Je me prénomme Yaniss et voici mon histoire. Je vous préviens, elle est vraiment cool.
Tout commence le lendemain du confinement de mars. Ma veine cave (celle du cou cote droit) s’est gonflée. Étant jusqu’ici en excellente santé je ne m’en fais pas plus et décide de laisser quelques jours, histoire de voir si cette turgescence (terme barbare pour désigner le gonflement d’une veine) disparaît d’elle même ou non. Une semaine passe et toujours pas. De plus, pendant cette semaine je commence à vraiment galérer à respirer, surtout pendant mes petites sessions de sport en solo (je faisais les séances avec Alex et P-J, les vrais savent). Sentant qu’il y avait (dézo pour l’expression mais elle est suffisamment cool pour justifier son emploi) une couille dans le paté, j’arrive tant bien que mal à obtenir un rdv d’urgence au médecin.
Oui, parce que ce que je ne vous ai pas dit, c’est qu’en plus d’avoir choisi le pic du covid et de la panique dans le système médical français dans mon genie absolu je me suis confiné dans le nord avec ma copine: sachant que je vis habituellement dans le centre (le 41 tmtc). Bref, ayant le nez creux, je prédis que je m’embarque pour de longues et palpitantes aventures. Donc ni une, ni deux, j’attrape quelques slibards, mon chargeur de portable et un livre : l’amour au temps du choléra de Gabriel Garcia Marquez (le mekhtoub mdr) et nous voila partis pour le médecin.
Bimbadaboum, le médecin me dirige illico presto vers les urgences les plus proches. Tout contents, on y va. Et c’est la que les choses vraiment cools commencent. En effet, car à mon entrée j’ai le mauvais gout d’avoir de la température, enfin un fébricule (soit a peine 38). Quoiqu’il en soit, cela suffit pour mettre les urgentistes dans la plus grande des détresses et de me placer en section covid sur le champ (d’autant que mon scanner des poumons n’était pas bon du tout). Pendant 5 jours…5 JOURS je suis en section covid, là où on te donne de l’hydroxychloroquine (LoL) et qu’à chaque quinte de toux des patients des autres chambres, tu as l’impression que leur âme tente de s’extirper de leur corps qui ne se résume plus qu’à un tas de cellules infectées. Après des scanners réalisés juste après des covideux refusant de porter le masque, avoir été mis sous oxygène et 2 tests négatifs ; une mission d’exfiltration est opérée afin de me sortir de ce champ de bataille virologique. Une ponction de 2L de liquide pleural (oui parce que c’était à cause ça que je galérais à respirer mdr), trois hôpitaux et quatre services plus tard, je me retrouve donc au service hématologie du CHU d’Amiens. Et c’est la que j’apprends la nouvelle. Vous aussi vous êtes au bord de l’apoplexie à cause de cette tension insoutenable ? de ce crispant suspens ? Et oui, c’est là-bas, après 15 jours d’hospitalisation que j’apprends que je fais partie de ce grand groupe que j’appelle “le groupe des bogoss”: les cancéreux. On me diagnostique un LH stade IV Bb à 22 ans (et oui, j’aime pas faire les choses à moitié, quitte à avoir un cancer, autant le faire bien). C’était début avril, depuis j’ai réalisé 15 chimios d’ABVD (soit presque huit mois). Ma dernière est prévue pour mercredi prochain. Je suis en rémission complète après trois mois, à reconfirmer fin novembre après l’arrêt des traitements.
Je tiens à remercier mes proches: mon reuf, ma daronne, mon daron, mes amis, mon directeur de thèse (de stage à ce moment là), mes encadrants de master ainsi que le service d’hématologie d’Amiens et de Tours. Et sans oublier ma dulcinea, mon amour de tous les jours: miss monde ; et toute sa famille. Je tiens également à réaliser une dédicace spéciale au covid. Oui, oui : au covid… car sans lui jamais je n’aurai eu accès aussi vite à tous les examens pendant mon hospitalisation. Jamais plus je n’aurai pu faire d’enfants, car à cause d’une trop importante présence à l’hôpital je n’ai pas commencé par la chimio classique dans les cas de stade IV : el famoso BEACOPP qui rend quasi à coup sûr stérile (80-90 pourcents). Et ayant superbement bien répondu à l’abvd je ne fais finalement pas de BEACOPP. De plus, j’ai pu terminer en télé-travail mon stage de fin d’année pendant ma chimio et donc valider mon année.
Encore deux, trois trucs (qui me semblent important à dire) et promis je vous laisse trkl.
Le cancer et sa guérison s’apparentent clairement à un marathon, une course d’endurance. Et non pas à un sprint. C’est long. Il faut être patient. A chaque jour suffit sa peine. Et la réalisation de petits objectifs quotidiens permet d’avancer, de garder le rythme. Parce qu’il faut se le dire : c’est dur. Il y a des jours avec, et des jours clairement sans. Les jours avec, profitez-en à fond. De même, les médecins le disent et le savent trop peu en réalité, le sport est un traitement à part entière. Il vous aidera à tenir, à mieux gérer la fatigue et les nausées. Il améliorera les résultats de votre réponse au traitement ainsi qu’il diminuera les risques de rechutent (je n’invente rien, allez voir l’association “malade de sport”). De plus il vous redonnera une image positive de vous même, car être malade c’est pas rigolo. Par contre se sentir capable d’efforts, de bouger, de s’améliorer et de continuer à se battre cela fait beaucoup de bien au moral. Cependant il faut savoir écouter son corps. Il y a des jours pendant lesquels cela ne sert à rien de pousser. Il faut savoir se ménager parfois. Par contre, dès que cela est possible, poussez-vous à faire du sport. Ah, et baisez un max ! Ça aussi c’est sehr sehr important.
Une toute dernière chose (car j’aurai aimé le lire quand j’y ai été confronté) : pour ceux qui se demandent si on sent la chambre implantable, si elle gêne, si on peut faire du sport avec, si c’est visible etc … car moi j’avais très peur de tout ça. Et bien franchement, on ne la sent pas du tout. J’ai la peau épaisse (un vrai russe comme on n’en fait plus) donc on la voit très peu chez moi, mais cela passe vraiment inaperçu: vraiment ne vous en faites pas du tout quant à ce truc.
J’espère avoir aidé ou, du moins, diverti quelque peu certains d’entre vous avec mon histoire.
Je serai tout à fait heureux d’échanger avec ceux qui le souhaitent.
De deux choses lune, l’autre c’est le soleil (Prévert)
Gardez le moral, l’amour vaincra !
Cordialement,
le plus bogoss des cancéreux,
Yaniss.