Je voudrais juste pousser un cri, un cri de désespoir, un cri de douleur, un cri de colère.
J’ai 27 ans et comme vous tous le ciel m’est tombé sur la tête et continue de me tomber sur la tête.
J’avais avant une vie formidable. J’étais heureuse. J’avais de la chance. Et j’en avais quand même déjà conscience.
J’aimais la vie et avait la naïveté de penser que je vivrai âgée, parce que le monde de la maladie était un monde qui m’était inconnu.
Je viens de terminer fin avril mon traitement pour un lymphome de Hodgkin de stade IIB.
J’ai pour l’instant la chance d’être en rémission, mais jusqu’à quand ? Dieu seul le sait si Dieu existe.
Je viens d’apprendre que mon père est également atteint d’un cancer de la prostate de stade 3 qui a métastasé sur les vésicules séminales. On m’a annoncé qu’il lui restait très certainement à peu près 3 années à vivre, peut être plus s’il réagit bien aux traitements.
Ces mots ne cessent de raisonner dans ma tête.
Je réalise que mon père ne connaîtra peut être jamais ses petits-enfants car cette MERDE de maladie ne me permet pas d’en faire pour le moment, et même peut être jamais.
Je rêvais de devenir avocate et mtn que je termine mes études, je me rends compte que je ne pourrai peut être jamais exercé car la fatigue me plombe et surtout parce que je n’aurai plus jamais les capacités physiques d’exercer un tel métier.
Cette vocation m’a occupé l’esprit 10 ans de ma vie, tous les jours, et j’ai travaillé très dur pour y arriver. Et tout a volé en éclat en 5 secondes. 10 ans de travail, de projets, de rêves, …
J’ai bien conscience que mon histoire est malheureusement plutôt banale.
Mais comment continuer à vivre après tout cela? Avec mon père qui risque de partir ? Avec le risque que moi je parte, qui sait peut être avant lui ? Comment continuer à faire des projets alors que si ça se trouve, fin juin on m’annoncera qu’il faut retourner faire de la chimio et pire me retrouver enfermer dans un hôpital pour subir une greffe ? Mais le pire dans tout cela c’est que la maladie m’empêche aujourd’hui d’accomplir mes projets, projets que je ne pourrai peut être jamais réalisé si la maladie me rattrape.
J’ai passé des jours et des nuits entières à lire et à relire vos témoignages et parfois vos blogs., à la recherche du témoignage réconfortant, celui qui me dira que je vais guérir et m’en sortir. Mais ce témoignage n’existe pas. Car même si certains d’entre vous s’en sont sortis et ont réussi à vivre leur vie après, qu’en est-il pour moi ? De quel côté des chiffres vais-je me situer. Car je suis bien contente de savoir qu’il y a 85 % de rémission complète pou les Hodgkin de stade II si je me trouve dans les 10 ou 15 autres %.
je me rends compte que certains d’entre vous souffrent et ont souffert plus que moi. D’autres sont même partis alors qu’on leur avait dit que “hodgkin se soignait bien”.
Je suis révoltée et en colère de toute cette souffrance tellement injuste qui ne devrait même pas existé. Je trouve que ce que j’ai subi est déjà assez dur comme ca mais savoir que certains d’entre vous se battent depuis des années et parfois, malgré tous leurs efforts, ne parviennent pas à rester en vie, ça me rend dingue. Ca me bouffe, c’est juste super dégueulasse, surtout quand on est jeune, et encore plus lorsque cette merde de cancer touche des enfants qui n’ont même pas eu le temps de respirer la pollution et de bouffer de la merde.
Alors OUI j’ai mal ! Pas uniquement pour moi mais pour nous tous qui n’avons pas mérité de vivre ça !
Oui je regrette quand j’étais en bonne santé de ne pas avoir vu cette jeunesse qui souffre et de ne pas avoir donné ma moelle osseuse quand il était encore temps, juste parce que j’avais peur d’avoir mal alors que la douleur du don n’est rien comparée à celle de celui qui le reçoit !
Oui j’ai mal de toutes ces jeunes femmes et ces jeunes hommes à qui on n’a pas laissé le temps de faire des enfants, alors qu’ils auraient pu être des parents formidables.
Et Oui j’ai horriblement mal de voir sur ce forum que certains d’entre nous sont partis là haut alors qu’ils aimaient la vie et ont accepté de souffrir pour rester parmi nous !
Comment vivre en paix avec tout cela ? Je ne sais pas. Je n’y arrive pas et surtout je ne pense pas pouvoir m’habituer à vivre avec la maladie parce qu’elle n’est pas acceptable !!!
Je ne peux pas m’habituer à voir mon père souffrir, ni les autres. Et je n’arrive pas à accepter cette nouvelle vie sans projets, assujettie au TEP SCANNER !
Certains d’entre vous me conseilleront d’aller voir un psy! C’est déjà fait depuis longtemps ! Mais le psy ne me rendra pas ma vie d’avant, ne me rendra pas mon père en bonne santé, et n’effacera pas ce qui est arrivé.
Je m’excuse de ce message qui a peut être heurtée une certains nombres d’entre vous, notamment ceux qui viennent d’appendre leur maladie et qui recherchent des messages pour se rassurer.
Je voudrai dire à ces personnes que chacun d’entre nous est différent et que mon histoire n’est pas leur histoire, et que s’ils sont optimistes, ils doivent le rester car c’est ce qui leur permettra de surmonter tout cela.