Lymphome folliculaire indolent: témoignage long

INTRO + A, B, C

A l’automne 2022, j’ai 49 ans. Je me plains de lourde fatigue et de gros problèmes d’immunité, au point que je passe à un valaciclovir par jour (puis deux) pour éviter la sortie de mon bouton (qui normalement ne vient qu’après antibiotiques ou gros stress) et que je garde mon rhume-toux tout l’hiver, malgré des soins. Ma médecin trouve une rechute de mononucléose dans mes prises de sang. On laisse passer quelques mois.

En juin 2023 je me réveille avec deux boules à l’arrière du crâne, en haut de la nuque. Ma médecin me dit de ne pas m’inquiéter et de revenir en septembre si des ganglions gonflent encore.

En septembre 2023, gorge, aisselle, aines… j’ai des boules partout. Nous commençons les investigations. Prise de sang, échographie, scanner, ponction. Ma généraliste m’envoie en hématologie. Les résultats montrent des ganglions énormes partout dans le corps mais pas la cause (ça n’empêche pas un radiologue de m’annoncer que je n’ai pas de cancer ^^). Il faudra un TEPscanner, une prise de sang plus complète et surtout une culture de cellules issues d’une nouvelle ponction pour que la réponse tombe, fin février : lymphome folliculaire indolent stade 3.

En mars 2024, je commence le traitement Bendamustine-Gazyvaro (2 jours toutes les 4 semaines) à l’Hôpital Saint-Antoine de Paris.

En juin 2024 le TEPscanner montre une rémission totale. Le traitement se poursuit. Puis j’entame les deux ans d’immunothérapie d’entretien.

J’écris cet abécédaire à la fin de la première année d’entretien (aujourd’hui, septembre-octobre 2025). Mes TEPscanners et prises de sang sont toujours bons.

J’aurais aimé recevoir des témoignages de personnes passées par là quand j’ai eu mon diagnostique.

Ma collègue atteinte d’un myélome m’avait donné quelques pistes mais très édulcorées. Je comprends aujourd’hui qu’elle a cherché à ne me donner aucun biais pour ne pas influencer mon parcours (ah, cette fameuse position neutre!). Pour ma part, ça m’aurait mieux convenu d’avoir un récit réaliste avec le rappel fréquent que c’est très différent pour chacun·e.

Je rédige donc ce que j’aurais aimé lire début 2024. Il s’git d’un ABCdaire de mon parcours de soin. Je publierai de temps en temps, par 2-3 lettres.

Bonne lecture!


A*nnonce (fin février 2024)

  • j’y suis allée avec mon amoureux et ma meilleure amie. Nous étions 3 à encaisser le choc et ça m’a fait du bien. Etre (littéralement) entourée m’a beaucoup soutenue.

  • j’étais en mode « efficace », prise de note et esprit clair. Je n’ai pleuré que le lendemain, dans le train. Pour moi et pour mes proches c’était ok. La médecin, elle, a cru que je réagissais mal.

  • j’étais l’une des premières patientes de l’interne qui consultait en tant qu’hémato. Avantages, elle cherchait à bien faire et prenait le temps. Désavantage, elle a loupé des infos qui m’ont valu des angoisses (le protocole de la pose de la chambre implantable, par exemple). Je garde un très bon souvenir d’elle, qui se remettait en question et me regardait avec douceur et compassion. Elle est partie en recherche en septembre 2024. Mon second docteur, très jeune aussi, a un autre style. On s’est habitué·e·s l’un·e à l’autre. Il a fallu le temps, maintenant j’ai confiance.

  • j’avais bien anticipé : j’avais prévu une semaine de vacances à la campagne pour me remettre d’une mauvaise nouvelle ou pour fêter un soulagement, en compagnie de mon amoureux. C’était un très bon plan. Processer, sans avoir rien d’autre à faire, nous a soudés dans la traversée de cette vague. Après de longues discussions, des crises de larmes, des bains, des balades et des feux de bois, nous étions prêt·e·s pour débuter le traitement. C’est aussi à la campagne que j’ai remangé de la viande pour la première fois depuis des années (mon hémato me l’avait conseillé mais en tant que végétarienne je ne savais pas du tout si j’allais y arriver. Eh si ! Mon amie éleveuse m’a convaincue en nous offrant mon premier repas carné).

  • petite anecdote : je cherchais un appartement depuis trois ans (par phases entrecoupées de ras-le-bol), aucun ne me convenait. J’ai visité deux appartements le jour du diagnostique, juste après l’hôpital et j’ai directement acheté le second. Il n’était plus question de courir les agences et visites ! J’ai déménagé en novembre. J’ai mené les complications administratives (la banque et le cancer, c’est un sketch!) et les travaux pendant ma chimio, tout en travaillant. Je ne dis pas ça pour faire la warrior mais pour témoigner que c’est différent pour chaque personne. Ca a été une année très difficile (avec des victoires et des crises) mais gérable (j’ai bossé et réglé l’appart).

B*actrim

  • j’ai lu en faisant mes premières recherches post-diagnostique que la prise de 3 Bactrim par semaine réduisait de 40 pourcents la mortalité des personnes qui prenaient le traitement. Une bonne raison de ne pas l’oublier tous les deux jours!

  • Je me demande à quel point cela affecte mes intestins. Il a l’air bien dévastateur. Vivement dans un an et demi… le microbiote doit être dégommé. Mon hémato dit que tout n’est pas mort. Mais j’ai des problèmes d’intestins depuis un an et demi maintenant.

  • Un an après la chimio, mon hémato m’annonce que l’on peut arrêter Bactrim après l’hiver. Je ne sais pas encore si je vais le faire ou non (il y a un sujet sur le forum à ce propos)

C*himio (mars 2024-aout-2024)

  • recevoir la Bendamustine (2j/mois pendant 6 mois) n’est pas douloureux. Mais c’est impressionnant (odeur de la chimie, transpi, flatulences… une vraie usine dégueu et mon goût en bouche avait cette odeur aussi, même avec de l’eau le goût était horrible). les effets ont été plus difficiles lors des deux dernières cures. Sinon je rentrait chez moi à pieds en faisant des détours (énergie très ok)

  • Je n’aurais jamais dû écouter les infirmières qui ont insisté pour que j’essaye le repas d’hôpital lors de ma première chimio. Résultat, je ne peux plus manger de poisson blanc. Mon corps en a fait un « no way ! ». Manger le matin et tard le soir après un super antinauséeux m’a beaucoup mieux convenu.

  • la première fois, on ne me donne pas d’antinauséeux pour voir comment c’est (moi j’ai bien vomi), puis antinauséeux léger (pour moi insuffisant), puis on change de médoc jusqu’à trouver le bon (pour moi c’est le 4ème avec l’ordo sécurisée mais pour une pote c’est le premier).

  • boire beaucoup (pas de l’eau du robinet… je ne savais pas, je remplissais ma gourde aux WC de l’hôpital, danger !)

  • faut pas se mentir, la chimio est violente. Elle abime. J’ai dû chercher selon mes troubles pour tout comprendre car l’équipe médicale ne donne pas la liste des effets secondaires complète vu que l’on n’a pas tout (et que ce serait flippant, je les comprends). Par ex, moi j’ai gardé mes cheveux comme avant, mais mes poils d’aisselles sont devenus fins et duveteux… va comprendre !

  • mais aussi, elle permet de rester en vie ! A chaque problème, j’ai pensé à remercier ce produit qui me bousille ET qui me permet de rester de ce monde.

  • 6 mois post-chimio, la vie est un peu plus facile… certains effets difficiles passent.

  • un an post-chimio ça va encore mieux

  • il paraît que le corps se répare. Ce sera sans doute vrai pour certaines parties (vivement la fin du Bactrim pour la flore intestinale!). Déjà, ce qui reste en bon état de mon corps n’est pas si mal ! (verre à moitié plein, coucou!)

  • PS : il est possible de se faire ses piqûres de booster de croissance tout·e seul·e. C’est une voisine de chambre qui me l’a dit et elle m’a simplifié la vie durant ces 6 mois de chimiothérapie !

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Bonjour
Merci pour votre témoignage du déroulement de la chimio.
En ce qui concerne le Bactrim c’est dépendant selon les personnes. Je suis sous bactrim trois fois pas semaine depui 2012 sans me porter plus mal que ca (pas pour un lymphome folliculaire).
Pour les antinauséeux c’est pas toujours efficace et de plus parfois on a la nausée rien qu’a essayer d’en prendre. (pour moi chimio a domicile fludarabin endoxan pour LLC).

Il n’est pas impossible que dans quelques mois vous aimerez de nouveau le poisson blanc. Dans mon cas l’odeur des oignons m’était insupportable (alors que je les adorait avant, et puis le dégout a disparu)?
Hervé C

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